mercredi 27 avril 2011

Brûlure









L'homme en rouge, c'est "Sang-Froid Gitan", un voisin... Récemment, il me dit, tu as vu sur la place de Ménilmontant, il y a des restes d'un appartement qui a brûlé dans un incendie. Le sol autour de mon arbre (son arbre est devant le métro, il y fait son nid de temps à autre) est jonché de meubles, de choses perdues, brûlées, de vieux papiers et d'un tas d'objets orphelins. Je veux faire quelque chose avec ça. Viens jeudi.

Ok. Je l'ai vu plonger dans cet amas d'encombrants encore non ramassés. Il a roulé sous les cartons, s'est recouvert de ces restes immobiles. La vieille télé, toute cassée, était béante : il s'est assis devant comme pour regarder un programme absurde. La foule est vite arrivée. Quelques rires, une sorte de stupéfaction, quelques cris. Bonne ambiance non loin de la bouche de métro. Et pourtant ce n'est pas simple de taquiner le désastre... 

C'était le 7 avril dernier. Une semaine plus tard, un incendie a ravagé un immeuble entier de la Cité du Labyrinthe, sous mes fenêtres. J'ai revu mon voisin, qui, grimpé sur son toit, me voyait photographiant à ma fenêtre à 3h du matin. On s'appelle, on échange quelques mots en s'apercevant au loin, mais que dire. 

Tout cela est éphémère : il performe par sa danse rougeoyante l'événement du feu que je montre à mon tour en différé dans ces quelques images, car ce n'est pas simple d'oublier la trace des flammes.

Les liens entre  poésie et désastre : 
l'homme en rouge dans l'arbre
Mes images de l'incendie
Le relais solidaire pour les sinistrés de l'incendie 

vendredi 8 avril 2011

Les passants

 












Il y a un mois, la lumière a changé dans Paris. En quelques jours, a eu lieu le passage de l'hiver au printemps, porté par cette lumière très particulière.
Je n'ai pu opposer aucune résistance à l'appel de la rue et des autres, que je ne connaissais pas, pour observer sur eux l'effet de ces lueurs printanières.
Afin de recevoir le flux incessant de la ville, je me suis postée jour après jour, des heures durant, tôt le matin ou en fin d'après-midi, à la bouche de métro de Ménilmontant. Suivant un élan obsessionnel d'être là, parmi d'autres,  il me fallait extirper un morceau d'intériorité, sans agresser, sans  voler ni causer du tort.  Les passants cadrés restent anonymes, circonscrits dans le flot débordant autour d'eux, mais ils appartiennent entièrement à la ville et c'est cela que je veux saisir. Ces passants m'intéressent dans leur mouvement que je ne perçois que 10 secondes. Avant, je ne les vois pas, après ils ont disparu. Un passage à l'acte difficile, car je suis là,  visible, présente et j'essaie de capter ce que j'aime de la ville à travers les expressions des visages qui passent. c'est physique, c'est un défi, c'est comme jouer avec de très grosses vagues. Il m'a fallu parfois arrêter face à la colère et à la menace de certains qui m'ont figée de longs moments parfois. J'ai aussi commencé à demander une sorte de permission, détournant la confrontation photographique vers une rencontre. Mais souvent, on ne voyait pas ou bien on était indifférent ou encore souriants.



A suivre...